Nous
quittons cet univers minéral au matin du 1 er janvier 2002, nullement
atteints par la fièvre de l'opale qui a pourtant retenue ici quelques
voyageurs. Pour nous, le prochain eldorado se situe à 750 kms d'ici.
Etape presque incontournable, (s'il en existe!!) sur cette route vers le nord,
Uluru et Ayers Rock, connus dans le monde entier, sont notre prochaine destination.
Sous un ciel bleu azur qui annonce une journée particulièrement
chaude, nous entamons la nouvelle année avec un moral d'enfer. Avec un
peu de chance, nous assisterons au premier coucher de soleil 2002 à Ayers
Rock, si célèbre pour les couleurs dont il se pare au crépuscule.
Mettant toutes les chances de notre côté, nous accompagnons même
notre habituelle pancarte de destination d'un carton où l'on peut lire:
'Happy New Year!' (Bonne Année!). Matinaux, les premiers bonjours et
réponses amicales nous sont donnés par les prospecteurs se rendant
à la mine, la soif de l'opale ne connaissant visiblement pas de jour
férié!
Nous attendons maintenant depuis une heure quand Graham arrête son pick-up
à notre hauteur. Dans l'habitacle conçu pour deux personnes, sacs,
valises et glacières occupent tout l'espace. Presque gêné
de ne pouvoir nous proposer d'avantage, c'est en s'excusant que Graham nous
aborde:
- Je suis désolé mais je n'ai pas d'autre place que sur le plateau
à l'arrière, nous indique-t-il en nous montrant ce qui nous fait
penser à une benne.
Sautant sur l'occasion qui risque de ne pas se représenter, nous acceptons
avec entrain l'offre qui nous est faite.
- Mais vous allez avoir chaud! s'inquiète-t-il déjà, réalisant
combien le risque d'insolation est élevé dans de pareilles conditions
de voyage.
- Mais non, mais non, pas de problème, insistons-nous, nous allons nous
couvrir et nous avons suffisamment d'eau.
- Vous êtes sûrs?
- Oui oui! répondons-nous en chur,
suffisamment persuasifs pour qu'il ne revienne pas sur sa décision.
Le temps de sauter dans la benne et nous entamons ce qui sera certainement notre
plus long trajet à l'arrière d'un pick-up : 750 kms!
Dès les premières minutes, nous sortons de nos sacs, polaires,
foulards et pantalons et couvrons toutes les parties de notre corps que le soleil
pourrait brûler. Déguisés en hommes bleus du désert,
les mains cachées dans les manches, nous nous installons le plus confortablement
possible sur la tôle du plateau du pick-up.
Adossés aux bidons de gasoil fixés à l'arrière de
la cabine, nous sommes ainsi coupés d'un vent déjà certainement
proche de 35°, qui souffle à plus de 100 km/h comme nous nous déplaçons.
Sans précautions, nous serions transformés en chips avant même
d'atteindre la moitié du parcours qui s'annonce bien long. Très
rapidement, nous trouvons des positions les moins inconfortables possibles tandis
que le pick-up Mazda
avale les kilomètres. Passagers très inhabituels aux allures de
clandestins, notre présence intrigue les rares véhicules que nous
croisons ou doublons. Parmi ceux-ci les interminables road-trains traînant
parfois jusqu'à 4 remorques et que nous mettons de longues secondes à
dépasser sur ces lignes droites sans fin.
Profitant des rares stations-services pour faire une pause et prendre des nouvelles
de ses passagers, Graham se présente 'par petits morceaux'. Écossais
d'origine dont l'accent me rappelle bien des souvenirs, notre chauffeur a loué
ce véhicule 4x4 pour 10 jours. S'il n'a pas au premier abord le look
du baroudeur-aventurier auquel on pourrait s'attendre, Graham est un voyageur
accompli. Passionné de désert, ce n'est pas sa première
visite en Australie. Loin de son bureau londonien où il dirige une petite
société de consulting dans l'enseignement, Graham se ressource
ainsi dans un univers bien loin de son quotidien.
C'est vers 18h que nous atteignons Uluru après 8 heures de transport. Moins éreintés que nous l'avions imaginé, Graham nous pose au seul camping de cette ville entièrement vouée au tourisme de masse. Après le désert, le choc est un peu rude. De toutes parts, les hôtels succèdent aux hôtels faisant eux-mêmes suite à des restaurants qui jouxtent les magasins de souvenirs en tout genre...