Et
la tournée dans les ambassades ne fait que commencer. A l'ambassade pakistanaise,
l'accueil est pour le moins austère. Ici on n'entre pas dans l'enceinte
diplomatique. Tels des guichets de PMU sur un champ de course, le service des
visas est accessible depuis le trottoir extérieur. Une poignée
d'Indiens fait déjà la queue, gardée de chaque côté
par des barrières métalliques anti-resquilleurs. Passeport et
lettre de recommandation en main, nous attendons notre tour.
- Hé Caroline, t'as vu le papier au dessus du guichet, là-bas
à gauche?
(Un imprimé en anglais stipule qu'aucun visa n'est délivré
aux étrangers non indiens.)
- Ouais... . On va bien voir, Abdel l'a obtenu...
Quand notre tour arrive, la réponse semble sans équivoque. Repoussant
notre passeport, l'attaché nous décoche un laconique :
- Non!
La partie va être serrée, j'abats alors d'autres cartes:
- Ce n'est pas un visa que nous voulons, nous en avons déjà un!
Ouvrant alors nos anciens passeports à la page du visa Pakistanais obtenu
à Pékin, non utilisés mais plus valides, j'ajoute en toute
mauvaise foi -un visa non utilisé dans les délais n'a aucune valeur,
mais bon...- :
- Nous voulons simplement que vous changiez les dates de ceux-ci. Nous avons
obtenu l'autorisation de traverser votre pays et bla bla bla, bla bla...
Reprenant alors nos passeports, l'homme reconsidère son refus. La porte
est entrouverte, nous nous y jetons. Quelques explications plus tard, l'homme
nous redonne nos passeports en ajoutant :
- Revenez avec le visa iranien, on étudiera alors la question.
- Merci beaucoup Monsieur. A bientôt alors... le quittons-nous fort d'un
bon espoir de décrocher le précieux visa à notre prochaine
visite.
A l'ambassade iranienne où nous sommes reçus comme dans une 'vraie'
ambassade, tout n'est qu'une formalité.
- Vous avez les formulaires dûment complétés et des photos?
Tendant 4 photos -'spéciales Iran' pour Caroline à qui il a fallu
prendre des photos d'identité avec un foulard cachant ses cheveux-, et
les imprimés, le fonctionnaire ajoute:
- Voilà, c'est 1250 Rps (environ 20 euros), revenez dans 4 jours. Merci.
Le délai nous semble long. Nous tentons de le réduire :
- 4 jours! Mais nous n'avons pas beaucoup de temps devant nous... N'est-il pas
possible de les récupérer samedi?... implorons-nous les larmes
prêtes à couler...
Un regard du genre "C'est ça ou rien!" nous stoppe dans notre
élan.
- Euh... Merci beaucoup Monsieur. A Lundi!
Et nous sortons avec le sourire, heureux de nous dire que nous avons déjà
le bout d'un pied en Perse.
Six jours plus tard, la première partie est gagnée. Sur nos passeports
flambant neufs, les deux premiers visas occupent les premières pages
: celui de l'Iran et celui du Pakistan. Certes ce ne sont que des visas de transit
qui nous autorisent une traversée de ces territoires en sept jours, mais
c'est déjà ça! Une fois en Iran nous essayerons de prolonger
l'autorisation d'une semaine supplémentaire.
Reste alors la dernière partie du voyage à régler. Pour
la Turquie, pas de problème. Les citoyens européens n'ont pas
besoin de visa. Deux coups de téléphone aux ambassades de Jordanie
et d'Égypte nous confirment que l'obtention des visas est immédiate
aux frontières. Mais comme nous le pressentions, l'affaire se complique
sérieusement avec la Syrie. Perdue au sous sol d'un bâtiment minable
d'un quartier situé à une dizaine de kilomètres du centre
de la capitale, l'ambassade syrienne est le cliché-même du repaire
malfamé. Ça commence bien...
Au guichet, un indien sikh nous reçoit :
- Pour obtenir un visa d'une semaine, il vous faut bla-bla-bla, bla-bla-bla..
Nous nous regardons, malheureusement peu surpris par les questions, les pourquoi
et comment qui semblent limiter l'entrée du pays de manière drastique.
- Si on était américain, je comprendrais, me glisse Caroline,
mais ils ont peur de quoi? Qu'on veuille y rester ou quoi?..
- Et 500 US$ en chèque de voyage par personne, rajoute-t-il comme si
cela ne suffisait pas.
.- Par personne! nous exclamons-nous estomaqués. Mais nous ne dépensons
même pas cette somme chez nous en France!
- Je sais, se laisse aller le fonctionnaire, alors que nous sommes maintenant
les seuls dans le bureau. Avec cette somme, vous pouvez vivre plusieurs mois
en Syrie, je sais. Mais je suis désolé : un nouveau consul vient
d'arriver et c'est lui qui a fixé ces règles. Je ne comprends
pas, confesse-t-il impuissant.
Sur le ton de la confidence, il termine :
- Ce sera compliqué d'obtenir le visa ici pour vous. Alors un conseil:
prenez plutôt votre visa en Turquie, vous l'obtiendrez dans la journée.
Le remerciant, nous quittons l'ambassade, et remettons tout à plat. Nous
devons admettre que nos chances sont très réduites ici. De plus,
nous n'avons pas vraiment envie d'acheter une telle somme de chèques
de voyage. Mais le problème est le suivant : l'ambassade syrienne en
Turquie se situe à Ankara, ce qui va nous obliger à un détour
de quelques 1200 kilomètres.
- Alors?...
- Ben je crois qu'on n'a pas le choix, si...? constate Caroline.
- Si! rétorquai-je tandis que l'idée vient de me traverser l'esprit.
On a encore une chance à Téhéran...
Satisfaite de ma trouvaille, Caroline acquiesce aussitôt, le sourire retrouvé.
Tournant définitivement le dos à ce quartier, main dans la main
nous nous dirigeons vers l'arrêt de bus qui nous ramènera à
notre 'chez nous'. La partie des visas est terminée pour l'instant.
Nous allons voir le Moyen-Orient...
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