Le Gwen Ha Du !!

Yannick, longeant la côte volcanique 'Sur l'île de Pâques, tout est très cher !' nous ont avisés de concert les guides consultés et les Chiliens rencontrés. Forts de ces bons conseils, les sacs à dos remplis pour une semaine (16 kgs pour caroline et 23 pour moi), après un rapide tour de la seule 'ville' de l'île, nous entamons notre trek pascuan en quasi-autonomie. Baroudeurs gonflés à bloc, dopés par la semaine hors du commun qui s'offre à nous, nous rejoignons la côte très découpée où nous nous offrons notre premier pique-nique.
- Ca ressemble un peu à la Bretagne, s'étonne Caroline, songeuse.
- T'as raison, c'est beau…
La lave solidifiée pour seule structure rocheuse donne à la côte un aspect étrange, presque lunaire. Captivés par le spectacle de la houle qui vient s'écraser sur ces impressionnantes falaises noires, nous observons en silence, finissant notre 'Vache Qui Rit' sous un soleil radieux. Si c'n'est pas ça le bonheur !
- Alors, on va où ?
- On commence par Orongo, c'est juste là-haut, proposai-je en pointant du doigt le sommet du volcan Kanokau. Drapeaux Pascuan et Breton
....usés!!!
- OK, ça marche ! répond Caroline qui me suiivrait au bout du monde...
Rejoignant alors la modeste route asphaltée qui y conduit, nous entamons cette longue montée vers le village de l'homme-oiseau.
- C'est chiant la route ! On devrait essayer de longer la côte, tu crois pas ?
- Tu crois qu'ils ont aussi un sentier des douaniers ? plaisante Caroline.
- J'sais pas… Reste là si tu veux, j'vais jeter un œil…
Empruntant alors un petit chemin bordant une propriété, je me dirige d'un pas décidé en direction de la côte. Tout à coup, sur ma gauche, planté devant la maison à quelques pas d'un muret de pierre, un mât où flottent deux drapeaux usés par les vents attire mon attention. …
Non, ce n'est pas possible !… Pas ici quand même ! On dirait… Me rapprochant alors de l'objet de ma surprise, malgré le délavage inhérent à des années de présence, il faut me rendre à l'évidence. Là, tout près de moi maintenant surmonté du drapeau pascuan, à quelques X kms de sa terre natale, flotte le célèbre drapeau breton : le Gwen Ha Du !
- Caro, criai-je, viens ! … Tu vois la même chose que moi ? continuai-je autant étonné qu'excité par cette 'découverte'.
- La vache ! Quand je disais tout à l'heure que ça ressemblait à la Bretagne !
- Tu crois qu'il y a un Breton qui habite ici ? …
- J'sais pas moi ! Le mieux c'est d'aller voir...
Maison aux drapeaux intiguants!...Comme pour faire durer une surprise qu'on serait bien déçu d'être mauvaise, prenant un peu de temps pour chasser l'émotion, faisant le tour de la propriété, nous nous risquons enfin à y entrer. Nous voyant arriver par la baie vitrée de la maison, une femme aux allures plus pascuanes que bretonnes, d'une trentaine d'années s'avance à notre rencontre.
- Bonjour ! entamons-nous le dialogue en français. Excusez-nous de vous déranger mais on vient de voir un drapeau breton là, continuai-je en pointant du doigt le Gwen Ha Du. Y aurait-il un Breton dans le coin ? interrogeai-je, ne pouvant cacher une certaine émotion.
- Ah oui ! répond la femme avec un fort accent 'pas-d'chez-nous' !… C'est mon mari, Patrice, qui est breton, poursuit-elle avec un large sourire de bienvenue. Echangeant un rapide regard complice, nous ne revenons pas d'une telle coïncidence.
- Mais il est pas là pour l'instant, ajoute-t-elle. Il est parti à l'aéroport chercher un autre Breton.
- Un autre Breton ? reprenons-nous, plein d'étonnement.
- Oui, il y a un Breton qui fait le tour du monde des Bretons qui l'a appelé il y a quelques jours pour savoir s'il pouvait venir ici le'La' Clara rencontrer. Alors Patrice est parti le chercher ! termine-t-elle tout simplement.
Nous, on n'en revient pas ! Pour le prix d'un, c'est pas 1 mais 2 Bretons que nous allons rencontrer ! Nous sommes tombés sur un nid… Quand Caroline me disait qu'elle se sentait ici comme à la maison, je me rends enfin compte de ce que 'intuition féminine' signifie ! Bon, OK, des Bretons, il y en a partout dans le monde, et des bretons grands voyageurs, c'est la même chose. Mais de là à tomber par hasard sur le seul Breton de l'île, le jour même où un breizhtrotter débarque, avouez quand même que la situation n'est pas banale !!
- Ils seront là dans une demi-heure ou une heure… Posez vos sacs, nous invite-telle, Patrice sera content de voir des gens de chez lui.
Poursuivant naturellement la conversation avec cette femme fort sympathique, ne voulant pas nous imposer d'emblée alors que nous ne sommes pas les Bretons attendus, nous lui faisons part de notre idée première de randonner jusqu'au village d'Orongo.
- A tout à l'heure alors, je vais dire à Patrice qu'il y a 2 autres Bretons ! éclate-t-elle de rire avec sa façon bien à elle de prononcer le mot 'Breton'.
Laissant alors nos sacs en consigne, encore sous le choc, nous entamons le cœur et le corps légers, la longue montée jusqu'au sommet du cratère endormi depuis des millions d'années.
Reportage suivantReportage précédent