Rando vers Maripa-Soula

43 kms à pied
Ca use, ça use!...Dix heures de marche nous attendent sur cette piste en latérite, nous quittons Papaïchton d'un pas rapide, sous un soleil voilé qui n'est pas sans nous déplaire.
Cette piste de terre qui traverse la forêt n'est en fait que très peu fréquentée. Très chaotique, elle n'excède pas un mètre de largeur sur certains tronçons, interdisant toute circulation motorisée, si ce n'est celle de rares vélos, motos tout terrain ou encore l'unique quad de Papaïchton. Ici, le Maroni est le centre de la vie locale et l'unique voie de communication par lequel tout transite.
Pourtant, ce layon quasi abandonné va, dans quelques mois, connaître un trafic jusqu'alors inconnu. Des militaires du génie travaillent en effet d'arrache-pied depuis maintenant 2 ans pour faire de ce sentier une piste colossale. Le chantier est gigantesque dans cette forêt amazonienne aussi dense qu'on peut l'imaginer.
Scène d'amour végétal...Nous avançons d'un bon pas, portant notre trentaine de kilos à nous deux sans trop de peine. Autour de nous, il n'y a que la forêt, peuplée d'animaux et d'oiseaux aux noms étranges qui nous font rêver: cochons bois, singes hurleurs, maïpouris, pacs, jaguars, toucans, aras, perroquets et autres oiseaux sentinelles...
De cette faune exotique, nous n'entendrons que les cris qui nous plongent déjà dans une ambiance spéciale. Depuis longtemps maintenant, les animaux ont appris à se méfier de l'homme qu'ils voient plus en prédateur qu'en observateur ému que nous serions! Mais ça, comment le leur expliquer!!! Alors nous nous contentons des bleus-barrés et des morphos, ces papillons géants d'un bleu électrique extraordinaire qui nous font l'honneur de visites fugaces au gré du chemin.

Yannick, au filtrage de l'eauVers midi, alors que le sentier est maintenant devenu une piste de plusieurs mètres de large, une averse très 'tropicale' nous oblige à nous abriter quelques dizaines de minutes. En quelques secondes, la route très vallonnée s'est transformée en un cours d'eau jaunâtre, ravinant déjà un travail pas encore achevé. Malgré la protection de nos ponchos, nous sommes rapidement trempés. La sueur se mélangeant à la pluie qui s'infiltre nous oblige bientôt à reprendre nos bâtons de pèlerins. Nous commençons à frissonner, le meilleur remède est encore de continuer...

Après 5 heures de marche et près de 25 kms parcourus, nous rencontrons une équipe de trois militaires dégageant les abords de ce qui est maintenant devenu une véritable autoroute.
- Autour de la piste, nous dégageons tout sur une largeur de 50 m environ, nous indique le responsable de l'équipe.
A quelques mètres, la tronçonneuse fait une coupe nette. Des milliers de mètres cubes de bois, précieux pour certains d'entre eux, sont ainsi sacrifiés à la réalisation de cette jonction.
Trouée de la forêt
aux abords de la routeLe paysage est totalement transformé. On pourrait bien sûr trouver beaucoup de choses à dire sur cette trouée dans ce qu'il convient d'appeler le poumon de la planète. Mais de quel droit refuserions-nous des voies de communication à ces villages isolés, synonymes de développement et parfois même de survie- il faut en effet savoir qu'ici des gens meurent faute d'hôpitaux à proximité-, sous prétexte que des hectares de forêt en moins ici risquent de mettre en péril l'équilibre de la planète toute entière? De la planète toute entière...  IL faudrait plutôt dire que la surconsommation des pays développés engendre une telle pollution qu'elle n'autorise pas les populations vivant encore comme au Moyen-Age à modifier leur mode de vie. Ils ne veulent quand même pas à nous interdire d'utiliser notre voiture, les sauvages?! ...
- Vous allez jusqu'à Maripasoula? nous interroge le militaire.
- Oui, répondons-nous en choeur!
- Si vous voulez, on peut vous ramener, on finit dans une demi-heure.
La proposition est trop belle pour entre refusée! Pour aujourd'hui, nous avons notre dose d'exercice et le paysage n'est maintenant qu'un éternel recommencement.

Vers 14h30, nous arrivons donc à Maripasoula à bord d'une JP5 de l'armée française... Nous sommes sales, en sueur et couverts de boue...