Dès
notre passage de la frontière côté indien, une armée
de rabatteurs se jette sur nous pour nous proposer bus et taxis à des
prix à faire rougir un local! Une grande agitation à l'image de
ce pays règne dans la rue principale. Musique, moteurs, rickshaws, vendeurs
à la sauvette et mendiants, vaches sacrées: l'Inde nous ouvre
ses portes!
D'un pas décidé, nous rejoignons l'endroit d'où partent
les bus -ce que nous ne pouvons pas appeler une gare routière!- et grimpons
dans un authentique Tata décoré comme un sapin de Noël. Direction
Gorakpul distant de 95 kms, et que nous atteignons 3 heures plus tard... Éreintés
par les douze heures de bus depuis ce matin, nous ne renonçons pourtant
pas à poursuivre notre folle course en avant, et achetons dans la foulée
deux billets de train pour Delhi: le train part dans deux heures...
Avant d'organiser notre 'circuit' en Inde, nous voulons en effet régler
le renouvellement de nos passeports à l'Ambassade de France. Nous en
profiterons également pour acheter deux vols pour Le Caire où
nous avons rendez-vous le 24 février prochain. Libérés
de ces problèmes d'intendance, nous pourrons enfin commencer notre voyage
en Inde. Et dans ce mois et demi (seulement!) dont nous disposons, il va nous
falloir faire des choix. Difficiles, comme toujours, l'Inde demande du temps,
beaucoup de temps. Et malheureusement, pour une fois, nous sommes tenus par
une échéance rapprochée. Nous allons donc devoir réapprendre
à voyager avec un timing serré, comme si nous profitions de nos
vacances annuelles...
Si
l'achat du billet en classe 'ordinaire' -il ne reste plus que ça, nous
disons donc adieu à la couchette!- ne pose pas de problème, trouver
le quai de départ du train est une autre affaire... Attirant l'attention
dans cette gare où les étrangers se comptent sur les doigts de
la main, nous devenons rapidement l'attraction. Fixés, épiés
comme des bêtes curieuses à la manière indienne qui ne connaît
aucune discrétion, nous interpellons en anglais, les 'admirateurs' qui
forment cercle autour de nous.
- De quel quai part le train pour Delhi? interrogeons-nous en présentant
le billet.
Dans un élan d'enthousiasme, et dans un anglais inexistant ou alors très
loin de celui de l'époque victorienne, les plus hardis y vont tous de
leur proposition.
- Venez, suivez-moi, propose le premier, c'est le quai numéro 1.
- Non, non, indique le deuxième, le train pour Delhi part du Numéro
6...
- Mais non, celui du soir par du numéro 3, nous assure un troisième...
Et la discussion entre eux commence en hindi, accompagnée d'éclats
de voix et de gestes théâtraux...
Pour être plus sûrs, nous trouvons à grand-peine ("
C'est par ici, non, c'est par là!") le bureau du chef de quai qui,
pour bien marquer sa position, prend tout son temps, lit et relit le billet
et nous indique le quai... numéro 2!
Nous commencions à douter mais la version officielle nous paraît
la plus crédible... jusqu'à ce qu'un homme ayant acheté
son billet avant nous nous interpelle:
- Le quai numéro 4, c'est par ici.
- Numéro 4??? Mais on vient de nous dire le 2!
- Non non, je vous assure, le train pour Delhi part du quai numéro 4.
Je vais comme vous à Delhi, suivez-moi, je vais vous montrer...
Nous sommes sur le cul! Il y a autant de versions que de personnes dans cette
gare: qui croire???
Tentant à nouveau notre chance auprès de voyageurs assis sur le
quai, rien ne se recoupe. Désemparés, nous choisissons de suivre
l'homme qui possède le même billet que nous sur le quai numéro
4. S'il se trompe, nous serons au moins 3 à louper notre train...
Et
finalement, nous avons raison: à 23h, très précises, le
train pour Delhi entre en gare.
- Venez, par ici! nous tire notre ange-gardien par la manche alors qu'il règne
sur le quai une confusion et un affolement indescriptible. Venez, les "Générales",
c'est le wagon du bout, nous indique-t-il avant de disparaître en courant.
Nous n'avons en effet aucune réservation et le premier arrivé
est le premier servi. La loi de la jungle en quelque sorte! Devant le wagon
qui n'a pas encore ouvert ses portes, nous arrivons en courant et retrouvons
un attroupement qui nous rappelle étrangement le voisin chinois. Ça
pousse, ça crie: la vraie panique! Pour pas grand-chose en fait, car
ce soir le nombre de places est largement supérieur au nombre de prétendants...
Aussi, trouvons-nous facilement deux sièges, sans prendre part à
la bagarre à laquelle les Indiens semblent conditionnés. Mais
très vite, nous comprenons la raison de cette bousculade. En quelques
secondes, les premiers montés ont déjà pris place sur les
porte-bagages instantanément transformés en couchettes. Pour une
poignée de roupies, ils sont en wagon-couchette! Voilà des billets
rentabilisés!!!
Alors que le standing indien est loin d'atteindre le confort de la classe 'assis
dur' chinoise, nous nous installons tant bien que mal et essayons de trouver
une position pour la nuit, engoncés dans nos sacs de couchage qui ne
sont pas de trop pour parer les courants d'air assassins. De toute façon,
nous sommes complètement KO, nous allons bien finir par dormir, non???
Sous l'oeil amusé des locaux,
nous nous nous endormons profondément sur nos sièges en bois...
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