Une demie heure à peine
nous suffit pour dénicher l'occasion rêvée: une chambre
luxueuse (pour nous!) avec salle de bain dans un hôtel entièrement
neuf pour 5 US$ (6 €) seulement. Sans plus tarder, et sans même déballer
nos sacs, nous sautons alors sur la télécommande... et découvrons,
comme des millions de Français l'ont fait quelques heures plus tôt,
la stupéfiante réalité des résultats. "Le Pen
est au second tour!".
Pétrifiés, le cur battant la chamade, nous ne pouvons en
croire nos yeux et nos oreilles. Écurés,
abasourdis, stupéfaits... nous restons sans voix, les yeux brillants
de colère. A nos côtés, Denis est livide.
"C'est
pas possible!". Ben si malheureusement! "La
bête" dont Pierre Perret annonçait le retour il y a quelques
années, vient de faire son retour. Pas plus cocardiers que cela avant
notre départ, voyager nous a sans conteste fait prendre conscience que
nous étions bien de quelque part. On n'est jamais plus français
qu'à l'étranger, et aujourd'hui, nous avons presque honte d'appartenir
à un pays où un électeur sur cinq croit que tous leurs
malheurs se résoudront d'un simple coup de matraque magique en direction
des méchants si faciles à reconnaître...
A
tous ceux qui croient en ce discours, qui ne sont jamais sortis de chez eux
et sont persuadés que "vivre en France n'est plus possible",
nous les invitons à aller voir un peu ce qui se passe ailleurs dans le
monde. Voyager devrait être
obligatoire. Voyager pour ouvrir les yeux et toucher du doigt une réalité
autre que celle de la télévision nous sert chaque jour. Voyager
pour se rendre compte que,
même
si certaines choses sont largement perfectibles, nous
sommes vraiment privilégiés de vivre dans ce pays qui s'est construit
sur le mélange des peuples.
La
haine et l'exclusion érigées en programme électoral ne
conduisent qu'à la haine et au chaos, l'Histoire nous l'a suffisamment
démontré, la réalité dans certains pays également.
Ce vrai coup de massue que nous venons de recevoir laissera, nous le savons
déjà, des traces. Depuis notre départ, cette nouvelle est
sans conteste, celle qui nous choque le plus. A
cette heure, nous aimerions presque être en France. Un peu comme un devoir
de se rapprocher des siens après un deuil. Être
'là-bas' pour pouvoir
participer au mouvement de lutte contre cette honte qui entache notre pays.
Parce qu'en tant que voyageurs,
nous savons qu'à compter de ce jour le regard des étrangers vis
à vis des 'Français' que nous sommes, ne sera plus tout à
fait le même. Et même si la nationalité ne fait pas l'individu,
elle oriente le regard de l'autre. Si nous avons
reçu ici et là des accueils si chaleureux simplement "parce
que nous étions français",
nous risquons maintenant de voir des portes se refermer pour la même raison.
La
honte est aujourd'hui sur notre pays après avoir placé si haut
l'incarnation des plus bas instincts,
gageons
que l'humiliation qu'il subira dans deux semaines remettra un peu les pendules
à l'heure. Après
avoir touché le fond, nous pourrons alors dire avec un clin d'il
que ce score du FN n'aura été "qu'un détail de l'histoire"
de France...
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