Dès
notre entrée dans l'ancienne Saigon, nous sommes impressionnés
par la circulation routière. Plus qu'à Phnom Penh, les centaines,
les milliers de mobylettes qui constituent la majorité des véhicules,
envahissent les rues. Telle une fourmilière, chaque artère reflue
de deux roues, il y en a partout! Cet impressionnant flot continuel, roulant
dans tous les sens, respecte des règles avec lesquelles nous allons très
rapidement nous familiariser. Comme dans le pays voisin que nous venons de quitter,
les panneaux et autres signalisations routières ne sont présents
qu'à titre indicatif, chacun ayant sa propre idée sur les notions
d'obligation ou d'interdiction. Ici en fait, il suffit de répondre par
l'affirmative à la question :'Est-ce que ça passe?' pour s'engager.
Le plus choquant à nos yeux - Caroline est effarée! - est sans
nul doute le non respect total de l'autre. 'Je m'occupe de mon véhicule,
fais de même avec le tien!'.
Lorsqu'on démarre et qu'on s'engage dans un flux de circulation, que
l'on tourne ou bien qu'on dépasse, à aucun moment
on ne semble se soucier des autres usagers. Les rétroviseurs ont ici
à peu près le même usage que les miroir de courtoisie des
sièges passagers de nos véhicules. D'ailleurs, ils sont pour la
majorité d'entre eux repliés dans l'axe du conducteur. Le reste
du temps, ils sont tout simplement ôtés, sûrement jugés
trop dangereux compte tenu de la densité du trafic. Les accrochages seraient
encore plus nombreux! Ici, la loi du plus audacieux, du plus fort et du plus
gros prévaut. Aussi vaut-il mieux être camionneur qu'automobiliste,
automobiliste que motocycliste, motocycliste que simple cycliste et cycliste
que piétons... que nous sommes!
Et quand on a compris ces quelques règles,
le capharnaüm qui peut sembler régner s'éclaircit un peu.
Alors que les rues d'Hô Chi Minh Ville peuvent paraître à
première vue impraticables, finalement on s'y fait assez vite. Dans cette
pseudo-jungle routière, il faut en effet ajouter trois ingrédients
sans quoi rien ne serait possible.
Le calme apparent des usagers tout d'abord, qui ne lancent 'que' des regards
de feu à celui ou celle qui vient de le bousculer, de faire une queue
de poisson dangereuse ou le serrer sur le trottoir... Jamais un geste malheureux ni un
cri, esprit asiatique oblige même si on en pense pas moins... Le temps
d'une seconde, pour rigoler, on imagine à peine les jurons et tours de
bras qu'un dixième de ces pratiques attireraient chez nous!...
Deuxièmement, l'acceptation
de cette loi qui consiste à se dire 'si j'arrive à maîtriser
ce qui se passe devant moi, ça va', simplifie les choses. Tant que vous
ne rentrez pas dans quelqu'un, vous êtes un bon conducteur en quelque
sorte, même si votre irresponsabilité provoque des accidents. Mais
ils sont derrière vous, vous ne vous en souciez guère, et en avant
la musique!
Dernier ingrédient dont l'absence est inconcevable ici: le klaxon. Organe
ABSOLUMENT indispensable de tout véhicule à moteur, son interdiction
serait une véritable révolution. En effet, où que vous
alliez, vous ne pouvez vous extraire de cette 'musique routière'. Pour
les étrangers que nous sommes, ceci est synonyme de passage d'un cortège
nuptial. Très rapidement, il nous faut nous rendre à l'évidence
: Hô Chi Minh Ville n'est pas le théâtre d'une noce permanente!
Si, outre une occasion exceptionnelle comme celle notée précédemment,
nous
utilisons chez nous cet accessoire pour prévenir d'un danger immédiat
, il est ici utilisé pour dire 'Attention je passe!', ou moins agressivement
'Bonjour, je passe!!'. Ce qui vous laisse un peu imaginez le décor sonore...
Et Hô Chi Minh Ville compte plusieurs millions d'habitants!...
Et bien oui, vous ne rêvez pas, c'est à peu près cela!!!
Si nous hésitons un peu au départ
à traverser les rues, nous nous conformons aux coutumes locales très
rapidement. Ô bien sûr, cela nous vaudra quelques frayeurs, mais
si on n'ose pas ici, on peut rester des heures à attendre d'être
en toute sécurité avant de traverser la chaussée!
Et puis finalement, malgré tout le mal que nous venons de dire, on se
rend compte qu'ils ne sont pas si mauvais conducteurs que cela! Quand ils vous
voient, ils vous évitent en faisant un écart des quelques dizaines
de centimètres, le conducteur d'à côté en fera autant,
et ainsi de suite.
Et jusqu'ici tout va bien!!
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