Reportage précédent Reportage suivant"Hotel, Massage?..."

Caroline, à la frontière thaïIl fait nuit noire comme nous passons la frontière de Padang Besar. Fatigués physiquement et mentalement, nous rêvons de trouver dans ce pays un petit coin tranquille pour nous reposer, un peu comme nous l'avons fait voici trois ans, après un séjour éprouvant en Inde.
De passage à Ko Samui et Ko Tao, notre première visite au Royaume de Siam nous a laissé une impression plutôt agréable. Dix jours durant, nous n'avions vu presque personne, nous nous étions reposés au bord de la mer, ponctuant nos journées de lecture et de plongée en apnée dans une mer digne d'un aquarium que nous n'avons retrouvée nulle part ailleurs: le pied!! Le tout agrémenté d'une nourriture thaï aux milles saveurs, rien que d'y penser, nous en avons l'eau à la bouche...

Les passeports tamponnés pour un mois, c'est à pied que nous entrons en Thaïlande. Un panneau de bienvenue nous rappelle que nous ne sommes plus en Malaisie. Et c'est vrai que la transition est brutale...
A peine sommes-nous libérés des formalités administratives qu'une armée de rabatteurs-chasseurs de touristes, nous harcèle: "Tuk-tuk? Taxi? Hotel? Restaurant? Hotel? Taxi?..."
Nous étouffons déjà!"Tuk-tuk ?"
Si nous n'avons jamais été de bons clients pour ces vautours, la fatigue aidant, nous sommes ce soir encore moins enclins à les écouter. Filant sans ralentir le pas, le regard droit même si nous ne savons pas encore où nous allons, nous savons par contre que suivre l'un d'entre eux, c'est ajouter 20 à 50% du tarif que nous obtiendrions seuls. Et puis, nous ne supportons pas ces méthodes de vente au pushing où on se rend bien souvent compte qu'on s'est fait plumé une fois la prestation réglée. Un peu de recul ne fait jamais de mal...

Dans cette ville frontière bruyante où les hôtels et les bars succèdent aux bars-hôtels dans une confusion à peine descriptible, nous nous enfonçons dans les rues perpendiculaires à l'axe principal. Sur les trottoirs, des dizaines de filles en tenue légère nous abordent au passage:
- Hotel? Night-club? Massage?
C'est bon, les filles, on vous a reconnues!...
La Thaïlande : un autre pays!...En quelques minutes, nous venons de plonger dans ce que la Thaïlande a de plus glauque à nous proposer: la prostitution. Se suivant sans discontinuer, les bordels -appelons un chat un chat!- aux noms aussi évocateurs que 'Paradise Lover', 'Love bar' ou encore 'Happy Girls' font travailler des filles qui racolent jusque dans la rue. Très jeunes pour la plupart, forcées ou consentantes, c'est le seul moyen qu'elles ont trouvé pour faire fortune. Et le touriste est une proie de choix si on en juge par la taille de son portefeuille. Prêtes à tout pour quelques dollars, elles vont jusqu'à laisser croire aux gros dégueulasses ventripotents venus jusqu'ici se taper des belles gamines qu'ils peuvent encore plaire... Destination de rêve pour tous les frustrés du monde qui sont persuadés que leur pouvoir d'achat leur confère tous les droits, la Thaïlande nous écœure ce soir. Nous venons d'atterrir à Bordel-ville et nous ne pensons qu'à une chose: fuir au plus vite.

Tendant le pouce, les trois voitures qui s'arrêtent nous demandent combien nous sommes prêts à payer pour rejoindre Hat Yai. Payer? Parce que nous avons des têtes de 'falangs' (d'étrangers)? Non merci, bonsoir!
Fatigués, nous prenons finalement un taxi collectif qui nous dépose à la gare routière de Hat Yai. A cette heure avancée, seuls quelques rabatteurs que nous ignorons battent encore le pavé. Sans motivation. Errant dans les rues mal éclairées, nous tentons de faire correspondre notre carte sommaire avec les noms des rues. Un vrai casse-tête.
Depuis sa terrasse où elle berce un bébé de 3 mois, une jeune femme toute sourire nous interpelle:
- Je peux vous aider? nous propose-t-elle en anglais. Asseyez-vous une minute, nous invite-t-elle alors que nous dégoulinons dAprès une journée 
de travail...e sueur. Tenez, prenez un fruit! poursuit-elle en nous tendant une corbeille.
- Vous venez d'où?
Cette gentillesse naturelle, sans arrière-pensée, nous va droit au cœur. En quelques minutes, elle nous indique la direction de l'hôtel le moins cher de la ville. Nous ne connaissons rien de ce pays et c'est cette image que nous voulons retenir, ce sourire et cet accueil que nous sommes venus chercher en Asie. Nous en oublions presque l'épisode précédent.
En prenant congé, elle nous retient encore un peu:
- Tenez, prenez ça! insiste-t-elle, en nous présentant maintenant à chacun une bouteille d'eau.
Nous sommes gênés mais nous savons aussi que refuser serait très mal perçu.

Le cœur plus léger et les jambes moins lourdes, nous rejoignons alors le Marco Polo Hotel, un hôtel misérable qui a le seul avantage de ne coûter que 120 baths (environ 3€) la chambre. Plutôt sale, sans fenêtre et dotée d'un seul lit de 110, mais avec douche et wc privés -enfin quelque chose qui ressemble à ça!-, nous restons dans notre budget.
KO, nous nous couchons sur nos sacs de couchage et nous endormons sans demander notre reste. Aussi bien que si nous étions dans un palace!
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