Reportage précédent Reportage suivant Sur les bords du Mékong

Soleil couchant sur le MékongIl est 13h quand nous arrivons à Luang Prabang, ville située au centre de la partie nord du pays, sur les rives du Mékong. Après le calme paisible, nous replongeons de plain-pied dans le bruit et la circulation hiératique de cette ville de province. Réfugiés dans une petite guest-house toute en bois aux cloisons qui nous permettent de nous tenir au courant de la présence ou non des voisins (!), nous avons décidé de faire une halte. De quelques jours, voire une semaine... On verra bien!
Après bientôt un an et demi de voyage, nous avons depuis plusieurs semaines déjà ralenti le rythme. Nous sommes dans une phase où le besoin de ne rien faire est le plus fort? Eh bien, nous allons nous écouter! Quand l'envie sera de retour, nous reprendrons la route... Une semaine durant, nous ne faisons pas grand-chose de concret. En revanche, nous réfléchissons beaucoup et encore à la suite de notre voyage. Carte du monde grande ouverte et encyclopédie numérique de l'ordinateur en route, nous rêvons de voyage... Paradoxal, quand nous réalisons que nous sommes au bout du monde mais un voyage est avant tout un rêve. Aussi, nous rêvons et discutons de Chine, de Samarcande et de la route de la soie, d'Ispahan et des souks du Caire, de désert et de traversée en méhari...

Et Luang Prabang dans tout ça? ... C'est notre réalité ça, c'est pas pareil! Bien sûr, nous traînons sur les marchés, laissant nos pas nous guider sur les berges du fleuve mythique d'Asie du sud-est, toujours conquis par les sourires et la gentillesse des Laotiens. Et cela nous suffit.
Scène de marchéLa chaleur de la journée ne nous pousse pas, il est vrai, à des exploits d'athlètes. Aussi préférons-nous la relative douceur qui accompagne les débuts et fins de journée pour sortir de notre 'PC'.
C'est ainsi que nous nous retrouvons sur les bords du Mékong, à un endroit que l'on pourrait appeler le port de la ville. C'est en effet d'ici que partent les embarcations à vocation touristique, de même que viennent décharger et charger les grosses péniches de ce qui était il y a encore peu, la seule autoroute pour marchandises du pays. Si aucune infrastructure n'existe, la main d'œuvre très jeune ne manque pas. Pieds nus ou en tongs, c'est à dos d'homme que tout se fait. Descendant les rives très abruptes du fleuve dont le niveau est très bas en cette saison sèche, nous assistons à un balai incessant d'allées et venues. Pour accéder à la péniche amarrée par deux grosses cordes attachées aux racines d 'un arbre, une succession de planches posées sur des pieux enfoncés dans la vase fait l'affaire. Tels des fourmis amenant un fétu de paille les 'dockers' laotiens chargent cette embarcation d'écorces d'arbres, dont nous ignorons la destination.
Dans une lueur blafarde que la brume omniprésente accentue, nous distinguons à peine le cercle orangé du soleil qui se couche sur le Mékong. Docker de Luang PrabangTout est calme malgré le chargement qui se poursuit. Nous sommes devant un véritable tableau vivant.
Avec ces hommes, nous échangeons quelques 'Sabaa-dii', 'Bonjour' mais la barrière de la langue ne permet pas d'aller plus loin. Jusqu'à ce que Mîi, un jeune laotien un peu plus anglophone, nous aborde.
- Bonjour, tu veux essayer? me propose-t-il en me désignant un ballot d'écorces qui n'attend que d'être transporté à bord...
- Pourquoi pas? enchaînai-je par jeu, sous le regard déjà amusé des autres face à l'apprenti docker 'falang' (étranger) que je suis.
Si la charge est supportable et ne dépasse pas 30 kilos, l'accès à la péniche par une planche de 40 cms de large surplombant les eaux est plus délicate. Loin de courir comme eux, c'est la jambe mal assurée et tremblante que pas à pas, j'avance péniblement, risquant à tout moment de basculer à l'eau avec la charge. Concentré comme un funambule sous le regard d'un public qui rigolerait de me voir plonger, la main tendue à l'arrivée est salvatrice tandis qu'on me félicite de l'exploit!
et déjà, le suivant arrive à grandes enjambées avec le ballot suivant...

Tant bien que mal, grâce à l'aide de Mîi, je comprends que l'homme en face de moi est le capitaine et que le bateau se dirige sur Vientiane.
- Sur Vientiane? répondis-je aussitôt... Et ce ne serait pas possible d'embarquer deux passagers? risquai-je dans la foulée.
- Si, c'est possible!Chargement d'une péniche
- Combien?
Un peu pris de court, le capitaine hésite et lâche finalement:
- 100000 kips (12€) par personne!
L'occasion est trop belle pour ne pas être saisie au bond.
- Le bateau par demain ou après-demain, ajoute Mîi. Si vous revenez demain, on pourra discuter de ça, finit-il.
Pleins d'espoir, nous rentrons à notre guest-house en priant le ciel pour que les conditions d'aujourd'hui soient les mêmes demain. Vivre 3 jours d'une telle descente sur le Mékong serait vraiment une belle aventure.
Au rendez-vous le lendemain à l'heure dite, il nous faudra malheureusement redescendre de notre nuage. Le capitaine de la péniche suivante qui parle anglais nous reçoit et déjà nous avons compris. Il vient de multiplier le prix par 5 et le regard amical u premier capitaine n'est pas celui du second. En un mot, nous sommes comme une marchandise de plus sur le bateau, un peu plus rentable, c'est tout! Sans contact, voyager dans ces conditions ne nous intéresse pas.
- Dommage, ça aurait pu être bien!
- Ouais, mais c'est comme ça! C'est que ça ne devait pas se faire...
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