Boisson locale par excellence, le rhum est à
la Martinique ce que le Whisky est à l'Écosse : une institution.
Qu'il soit Blanc, Paille, Ambré ou Vieux, le rhum fait ici l'objet d'un
véritable culte. Actuellement, il ne subsiste plus que quelques distilleries
des dizaines d'établissement au début du siècle. Les plus
conneus sont : De Paz, Neisson, Clément, Trois
Rivières, JM, Dillon, Saint James, Lamauny, Saint Etienne et Bally.
Toutes propriétés de Békés, les distilleries de
rhum sont dissiminées sur toute la Martinique. Parmi celles-ci, nous
en visiterons trois, où nous tenterons de comprendre le procédé
de fabrication de ce délicieux breuvage, ainsi que les dénominations
et appellations qui le qualifient. Voici ce que nous en avons retenu...
Mais avant toute chose, il semble indispensable de faire la distinction entre
Rhum Agricole et rhum industriel. S'ils sont appelés 'rhums' tous les
deux, ceci est uniquement lié à l'origine du produit de base à
partir duquel on distille cet alcool : la canne à sucre. En fait, ils
ne sont tous les deux que de lointains cousins. Ne dites pas à un Antillais
que c'est la même chose! Vous risqueriez de le mettre en colère...
La différence essentielle réside dans le produit de base utilisé.
Le Rhum Agricole est élaboré à partir du jus de la canne
uniquement. En revanche, le rhum indutriel est fabriqué avec les mélasses
de sucreries, qui sont en fait les résidus issus de la fabrication du
sucre. Dernier point : le caramel est utilisé pour donner sa coloration
au rhum industriel. Pour le Rhum Agricole, la teinte est naturellement obtenue
après vieillissement en fûts de chêne.
Dans la suite de ce reportage, nous ne ferons plus allusion qu'au plus noble
: le Rhum Agricole, seul rhum que l'on produit en Martinique.
De la canne à sucre à la
bouteille de rhum, le procédé de fabrication n'a pas beaucoup
été modifié depuis ses origines. L'industrialisation et
la technologie ont certes apporté des outils et moyens de production
nouveaux, mais le principe de base demeure le même et peut se découper
en 5 étapes.
Étape
1 : La canne à sucre mature est coupée entre février
et mai, à la main comme autrefois chez 'Trois Rivières' par exemple,
ou plus généralement, à la machine.
Étape
2 : Après pesage (pour information, une tonne
de canne est nécessaire à la production de 100 litre de rhum),
la canne est lavée.
Étape 3 :
Elle est ensuite broyée à
par des moulins qui vont permettre l'extraction du sucre contenu dans la tige.
( Pour que le process soit optimal, la canne est aspergée d'eau à
chaque passage). Le jus collecté est ensuite pompé et filtré
avant d'être stocké dans une cuve de fermentation.
Notons au passage que les moulins sont actionnés par une machine à
vapeur, dont l'unique combustible de la chaudière est la 'bagasse'. Et
la bagasse n'est rien d'autre que la fibre de canne, issue de l'opération
de broyage. Ecologique non?
Étape 4 : Le jus va fermenter
dans des cuves de fermentation en inox pendant 24 heures et se transformer en
un vin titrant 4 à 5 degrés d'alcool.
Étape
5 : Ce vin va ensuite être distillé selon le procédé
de 'Distillation en continu'. ( La distillation traditionnelle, identique à
la distillation traditionnelle de la Goutte bretonne ou du Calva normand ne
se fait plus guère qu'en Haïti).
Le petit schéma suivant 'fait maison' permet, mieux qu'un long discours,
(on l'espère!), de comprendre cette opération.
Transparent, le rhum titre alors 70° à sa sortie des colonnes à distiller. Coupé d'eau distillée, on abaissera son titrage en alcool jusqu'à 55 ou 50 pour le commercialiser sous l'appellation 'Rhum Blanc', après quand même un séjour de 3 mois en foudre de chêne où il 's'assouplira' sans toutefois se colorer.
Le Rhum Vieux lui sera lui directement mis en fût de chêne
où il prendra naturellement sa coloration. Pendant les 3 ans de vieillissement
( ceci est un minimun indispensable pour prétendre à l'appellation
'Rhum Vieux'), son degré d'alcool s'abaissera naturellement par évaporation.
C'est ce qu'on appelle 'la part des Anges', estimée à environ
8% par an. A l'embouteillage, le degré d'alcool sera ajusté grâce
à l'ajoût d'eau distillée.
L'appellation 'Rhum Paille' est donnée à un rhum dont le
viellissement en foudre de chêne (le foudre fait plusieurs milliers de
litres) pendant 18 mois. Compte tenu de la durée du process et de la
limitation de la surface en contact avec le bois, la coloration du rhum paille
est beaucoup plus claire que le rhum vieux, d'où son nom d'ailleurs!
Certains fabriquants comme De Paz à Saint Pierre possède un rhum
qu'ils appellent 'Rhum ambré'. Ce dernier est en fait un rhum
paille qu'on a laissé vieillir 24 mois au lieu de 18. Ceci est l'unique
différence.
Il nous nous reste plus qu'à vous
dire 'A la vôtre', et consommer en peu, mais du bon!!...