Après
une journée de repos qui nous permet de prendre nos marques, nous partons
pour une première randonnée à la journée, qui nous
amène jusque sur les hauteurs du Glacier Martial qui domine la ville.
Seuls, nous profitons des paysages exceptionnels qui empruntent tout d'abord
les pistes de fond avant d'entamer une ascension à couper le souffle.
A intervalles réguliers, un vent glacial nous rappelle où nous
sommes...
En bas, la ville d'Ushuaia et le Canal de Beagle offrent des couleurs fantastiques.
Frigorifiés, le bonnet enfoncé jusqu'aux yeux, nous prolongeons
au maximum ces moments magiques, profitant des quelques minutes de répit
avant que l'onglée n'apparaisse pour mitrailler dans tous les sens! La
vache que c'est beau!...
Dopés par cette expérience,
les sacs bourrés de provisions pour 2 jours, nous partons dès
le lendemain pour le Parque Nacional de Tierra Del Fuego. Enchantés par
les paysages splendides de parc sauvage, nous installons notre premier bivouac
à quelques pas du Canal de Beagle.
Tandis que Caroline installe la maison, je m'occupe du feu où cuit déjà
une bonne soupe. A 18h, alors que la nuit est déjà tombée,
nous nous glissons dans nos sacs: il ne fait que 3 petits degrés.
Levés en même temps que le soleil, vers 8h30, nous sortons un peu
à regret de nos duvets où nous avions bien chaud. Sortant de la
tente pour faire un bon feu, je m'étonne de voir le sel à terre,
tout près de la tente.
- Caroline?
- Hum?..
- C'est toi qui a laissé le sel par terre hier soir?..
Faisant alors un rapide tour du regard, je comprend aussitôt!
- Caro! Viens voir! On nous a tout bouffé!
A quelques mètres de la tente en effet, le sac de nourriture que nous
avions - intelligemment - pendu à un arbre pour profiter de la réfrigération
naturelle de l'extérieur, a été entièrement éventré!
Par terre, disséminés de part
et d'autre, des sachets plastiques vidés de leur continu, un pot de 'dulce
de leche' (la confiture de lait locale) et deux boîtes de conserve. Plus
de trace du jambon, du saucisson, du pain, des gâteaux, ni même
du beurre! Tout a disparu! Comme des débutants, en accrochant la nourriture
à moins d'1 m 50 du sol, nous l'avons tout simplement offerte aux zorros
(renards), nombreux dans le parc... En clair, les courses faites hier l'ont
été pour les renards... Tu parles de routards, toi! On en rigole
tellement c'est gros! Le plus bête dans tout ça, c'est qu'on a
plus rien à manger.
- Alors on fait quoi?
- On continue! s'exclame Caroline motivée. On avisera plus tard.
- Plus tard, plus tard... T'as raison, il fait beau, on va en profiter. Si on
ne mange pas aujourd'hui, on ne va pas en mourir.
- Allez hop! On y va!
- Ben attends, on va quand même se chauffer un petit thé. Faut
pas qu'ça nous coupe l'appétit, c't'histoire-là!
Une demi-heure plus tard, les dents brossées - notre seule coquetterie
- , nous entamons une rando de ' heures sur les bords du canal.
Tantôt
dans la forêt, tantôt sur les berges escarpées de ce bras
d'océan aux eaux d'une limpidité incroyable, nous profitons au
maximum des dernières heures de soleil avant l'arrivée de l'hiver
austral. Malgré la fraîcheur, nous nous arrêtons de longues
minutes pour contempler dans un silence à peine troublé par des
oies sauvages, ces paysages que nous avalons du regard.
D'un tranquillité et d'un calme incroyable en cette saison, nous avons
l'impression que tout cela nous appartient. C'est tout simplement splendide!
Comme un clin il, en fin de randonnée, nous rencontrons un zorro
(renard) peu farouche qui demeurera à 7-8 mètres de nous pendant
de longues secondes. N'ayant aucune preuve de sa culpabilité, nous le
laisserons repartir tranquillement après les quelques photos d'usage...
Vers 14h, après avoir hésité de longues minutes, nous décidons
finalement de mettre un terme à notre 'trekking' de 2 jours qui n'aura
duré que 28 heures!... Après un arrêt au supermarché
du coin, nous refaisons des provisions que les zorros ne viendront pas chercher
jusque dans le cur d'Ushuaia!