De
retour à Puerto Natales après cette tentative ratée de
randonnée dans le Parc national de Torres del Paine, nous atterrissons
de nouveau chez Danicar, la maison d'hôtes qui nous avait reçus
2 jours plus tôt.
- Voilà, nous sommes déjà de retour! clamons-nous en entrant.
- En voyant le temps, nous nous sommes doutés que vous ne pouviez pas
rester! répond Daniela.
La ville est en effet presque paralysée par le verglas et la neige qui
rendent tout déplacement très compliqué. Au niveau des
routes, des rues, des trottoirs, aucun déblaiement, salage ou sablage
n'est mis en place. Seuls quelques rares commerçants ont nettoyé
tout au plus quelques mètres de trottoir accédant à leur
boutique. Pour résumer: la ville est une immense patinoire et les têtes
à queue en voiture, les chutes de vélo et de piétons sont
nombreuses.
Chez nous, on entendrait la population hurler sur 'ces fainéants de l'équipement'
(!), ici, on considère qu'un tel temps incite à rester chez soi!...
Et c'est ce que nous allons faire pendant 3 jours et demi! Alors qu'un froid
glacial s'est maintenant installé sur la région -avec des températures
ne dépassant pas - 7° journée, nous travaillons nos reportages
argentins sur l'ordinateur, emmitouflés jusqu'aux oreilles dans nos sacs
de couchage! Dans la pension où nous avons trouvé refuge, le simple
poêle sensé chauffer l'étage nous réchauffe à
peine plus qu'une bougie dans une chambre. Bref, nous caillons ferme: il fait
entre 10 et 15° où nous travaillons immobiles. C'est certainement
notre flamme intérieure qui nous permet de tenir le coup, aidés
de quelques tasses de thé...
Après 25 heures de travail, les yeux explosés, le dos en vrac
et une certaine dose de fatigue nerveuse, nous voyons enfin le bout du tunnel
et la fin des reportages de nos semaines précédentes.
Il est 14h ce dimanche 27 mai et la température est de -5°. Et comme
pour maintenir une tradition dominicale, nous décidons de 'sortir faire
une petite balade'... La ville est déserte, presque morte, comme congelée
par l'hiver austral qui
vient de faire si brusquement son apparition. Sur le bras de mer qui vient mourir
au bas de cette ville entourée par les montagnes, une colonie de flamants
roses est arrivée annonçant déjà la rigueur des
températures plus au sud. Malgré gants et bonnet, nous avons beaucoup
de peine à nous réchauffer. Le vent glacial qui souffle en rafales
nous transperce jusqu'aux os. Malgré tout, nous essayons de prolonger
ces moments de contemplation d'un paysage aussi magique. Au premier plan, les
flamants roses volent la vedette aux caïquenes (genre d'oie de Patagonie),
cygnes à cou noir et autres oiseaux marins. Prolongeant le bras de mer,
la chaîne de montagnes du Paine vient très rapidement boucler ce
paysage extraordinaire, à peine éclairé par un soleil orangé,
presque blafard, qui semble grelotter dans le ciel d'un bleu très pur.
Au sol, la neige assourdit tous les sons ajoutent encore au tableau vivant que
nous admirons une dimension irréelle.
Seul le froid vif, cinglant maintenant, nous rappelle à la réalité.
Si je n'accuse qu'une onglée, Caroline est transie de froid et ses lèvres
bleuies accélèrent notre retour au chaud.