A nos petits soins!

Chez Analia et RaülLes tickets de bus offerts par la cousine de Caroline qui craignait de nous voir rester plus longtemps (!) nous permettent de rejoindre le centre de Rosario. Il fait maintenant nuit et cette ville peu engageante n'est absolument pas faite pour le touriste de passage.
- Un hôtel pour routards? Non, vous ne trouverez rien ici... A moins que... Venez, je vous emmène jusqu'au Centre de Sport de la Jeunesse Chrétienne, nous propose gentiment un jeune homme rencontré dans le bus.
A notre arrivée, nous pensons arriver dans un genre de Youth Hostel (Auberge de Jeunesse) mais nous déchantons rapidement.
- Ah non, nous répond un homme d'une quarantaine d'années. Ici, on ne fait que du sport!!... Vous cherchez un hôtel?... Attendez un peu, je suis venu récupérer mes enfants, je vous emmène si vous voulez!
- Avec plaisir, merci!

Et nous nous retrouvons assis dans le minibus Mercedes de Raül qui prend aussitôt les opérations en mains.
- Ici, il n'y a vraiment pas grand-chose pour des voyageurs comme vous. Il y a bien quelques hôtels, mais à 40$ la nuit minimum... On va trouver quelque chose! termine-t-il, comme si nous l'avions investi d'une mission. Tournant dans une ville qu'il connaît comme sa poche, il se charge lui-même d'aller demander les prix des chambres dans les hôtels et revient toujours en nous disant:
- Non, ici, c'est trop cher!
Analia et son maté
Amusés par cette prise en charge, nous lui faisons entièrement confiance tandis que ses deux garçons discutent avec nous.
Après une demi-heure de recherches infructueuses, Raül gare finalement son fourgon dans son garage et nous dit:
- Bon, je vous emmène manger à la maison. Pendant le repas on va réfléchir, on va bien trouver une solution! nous annonce-t-il sans vraiment nous demander notre avis... Mis devant (l'agréable!) fait accompli, une seule réponse est alors possible:
- OK, vamos! (Allons-y!)
Accueillis à bras ouverts par Analia, sa femme, dans leur petit mais sympathique appartement, nous avons du mal à réaliser.
- Mais pourquoi vous faites tout ça pour nous? les interrogeons-nous, un peu gênés de provoquer un dérangement.
- Bah c'est comme ça! lâche Raül. Aujourd'hui on vous aide, demain ce sera vous! C'est la vie ça!
Effectivement, c'est vraiment ça, la vie. Mais il n'est pas donné à tout le monde d'avoir cette ouverture d'esprit et un coeur suffisamment à l'écoute des autres pour accueillir chez soi 2 parfaits inconnus. Quand on connaît la valeur d'une rencontre et la richesse qu'elle peut apporter, on a parfois du mal à comprendre le monde de reclus dans lequel nous vivons. Mais ça c'est une autre histoire...

Pause photo au salon- Allez-y, mettez-vous donc à l'aise! Alors comme ça, vous venez de France...
- Oui oui! Ajoute malicieusement Juan Ignacio, l'aîné de 15 ans qui apprend un peu le français à l'école.
Comme de vieux amis, la conversation se poursuit fort agréablement jusqu'à l'arrivée d'un voisin
- Tiens Ernesto, on a ici des Français qui recherchent un endroit pas cher pour dormir. Tu ne connaîtrais pas quelque chose?
- Des Français! s'exclame-t-il dans la langue de Molière. Ah bon et vous venez d'où?...

Vers 22h30, alors que nous ne savons toujours pas où dormir, Raül reprend les choses en main.
- Il y a bien le sous-sol de mon bureau en face, mais il n'y a qu'un local, s'excuse-t-il presque...
- Un local fera largement l'affaire! réplique Yannick, nous avons ce qu'il faut pour dormir.
Et ainsi, nous nous retrouvons dans le sous-sol aménagé en salon de la petite entreprise de taxi collectif 'First Level'.Bivouac au rez-de-chaussée
 du bureau de Raül
- Si vous voulez du chauffage c'est ici, nous indique Raül presque gêné de ne pouvoir nous offrir d'avantage...
- C'est plus que parfait! Encore merci pour tout!
- Merci pour quoi? nous demande-t-il étonné. Je vais être obligé de vous enfermer derrière le rideau de fer ajoute-t-il. Demain je viens vous chercher à 8h, vous prendrez le petit-déjeuner à la maison et je vous mettrai sur la route de Buenos Aires, termine-t-il. Bonne nuit!
- Bonne nuit et encore merci! répondons-nous tandis que le rideau de fer s'abaisse bruyamment.

Nous nous regardons, les mots nous manquent pout traduire ce que nous ressentons face à autant de gentillesse. Ce soir, nous savons que, rien que pour des rencontres comme celle que nous venons de vivre, le voyage que nous vivons est exceptionnel. Ce soir plus que jamais, nous savons que tous les efforts que nous avons consenti pour réaliser ce rêve valaient la peine.

Protection policière!...Comme prévu donc, le rideau métallique se lève à 8h, nous déjeunons chez nos hôtes de la veille et, Raül nous déposera à la sortie de la ville 'où c'est plus facile pour le stop'!
Nous sommes ici à quelques centaines de mètres des bidonvilles de Rosario, les quartiers les moins sûrs de la ville. Sur le pont qui ejambe l'autoroute vers Buenos Aires, une voiture de Police est stationnée, indiquant ostensiblement que les garants de la loi surveillent... S'arrêtant juste derrière leur véhicule, Raül nous laisse quelques secondes seuls dans son minibus avant de revenir.
Je leur ai demandé de s'assurer qu'il ne vous arrive rien de fâcheux, nous indique-t-il dans un sourire protecteur.
S'il nous en restait, les bras nous en tomberaient une nouvelle fois! Jusqu'au bout Raül aura été à nos petits soins, nous prenant entièrement sous sa coupe, par gentillesse, tout simplement... Etrangers hier soir, c'est en amis que nous nous quittons, encore sous le choc de cette exceptionnelle rencontre.
- Si jamais ça ne marchait pas, vous m'appelez, hein? Voici mon numéro!
Moins d'une heure plus tard, un voyageur de commerce s'arrêtera pour nous déposer à Buenos Aires même...

Reportage suivantReportage précédent