Nous arrivons à
Mexico le 2 Novembre au matin, exténués après 5 jours de
bus non-stop depuis New-York. Après une installation rapide à
La Casa de los Amigos, sorte d'auberge tenue par les Quakers (religion américaine),
nous feignons d'ignorer la fatigue pour assister à une cérémonie
d'une importance capitale dans la culture mexicaine: celle du jour des morts.
Jour férié pour les mexicains, il est le dernier des 5 jours consacrés à la mémoire des morts. Non sans un certain côté que l'on qualifierait de morbide en France, ces journées du souvenir révèlent l'esprit avec lequel les Mexicains voient la mort.
Ainsi, le 28
Octobre salue la mémoire des accidentés; le 29 Octobre, celle
des noyés; le 30 celle des mort-nés. Du 31 Octobre à midi
au 1er Novembre à midi, c'est la journée des enfants décédés.
Le 2 Novembre, tous les vivants sont réunis dans une journée du souvenir consacrée à tous les défunts
sans distinction. Journée très populaire, elle donne lieu à
de nombreuses manifestations à travers tout le pays.
Fêtes populaires à mi-chemin entre le culte catholique et le paganisme, elles traduisent une certaine fatalité face l'ultime événement de la vie. Alors, comme pour défier la mort et lui montrer qu'on n'en a pas peur, on la représente et on l'affiche sous toutes ses formes plus ou moins macabres.
A Mexico, la place de la cathédrale est noire de monde.
Au centre de la place, des centaines de tombes ont été mises en
place et portent les noms de gens célèbres (parmi les écrivains
figure notamment JP Sartre!). Abondamment fleuries et protégées
par des cordes de sécurité, elles matérialisent la sépulture
de tous les défunts connus et inconnus.
Un concert en plein air est également donné. Sur la scène, les artistes prennent par leur maquillage et leur déguisement, le visage de la mort, comme pour la défier. 'La vida vale nada!', scandent-ils, pour conjurer le mauvais sort.
Les déguisements ont également la part belle dans la foule, surtout chez les enfants. La mort en est, là encore, le thème principal. Squelettes, vampires, sorcières sont les plus populaires.
Des villages tiennent des stands morbides dont la popularité est manifeste. Crânes, ossements humains, corps, sont harmonieusement positionnés pour constitués des 'tableaux'... Ainsi voit-on une horloge dont les 12 divisions sont des crânes et les aiguilles des os..
Nous reconnaissons
aussi l'Ankou, le messager de la
mort fort connu dans les légendes bretonnes, reconnaissable à
sa faux dont le tranchant est extérieur. De nombreux symboles sont là
pour vous rappeler que vous êtes mortels. Le plus impressionnant est sans
conteste présenté sur un stand où sont affichées
les photos de cadavre -souvent assassinés..- et des miroirs vous renvoyant
votre propre image...
Étrange, étrange que cette fête des morts, dont la ferveur populaire est impressionnante, le tout se déroulant dans une atmosphère de joie, où la musique tient une place importante.
Nous
rentrons à la Casa, conscients d'avoir assisté à quelque
chose de 'spécial', aux antipodes de la larmoyante Toussaint que nous
connaissons...